-Ce général Esdeath… Je n’attends que le jour où sa tête roulera à mes pieds. Une seconde défaite ne serait finalement pas une mauvaise chose pour ce pays.
Ouvrant un petit bar en bois d’acajou situé sous la fenêtre ruisselante de l’eau de pluie, il se servit un verre de whiskey avant de s’asseoir dans l’un des deux fauteuils disposé juste devant la table qui était elle-même non loin du bar. Ce petit coin était aménagé au centre de la pièce, qui était emplis d’étagères regorgeants de livres. L’endroit portait bien son nom de petit salon due à une atmosphère boisée et assez chaleureuse laissant imaginer de bonnes soirées entre collègues pour discuter autour d’un verre et d’un cigare, et avoir de quoi se divertir en lecture si le besoin s’en faisait sentir. De ce fait, petite bibliothèque aurait pu être une dénomination tout aussi bien avisée.
Après quelques gorgées, le regard sec et sévère de l’homme se leva de son fauteuil, puis entra dans quelques rayonnages de la petite bibliothèque. Il se saisit d’un livre de sa main libre, et l’ouvrit habillement de sa seule main disponible. La page qui arriva sous ses yeux était écrite en langue ancienne semblai-il. Une lune et un soleil ornaient chaque côté de l’ouvrage qui semblait trop stylisé pour paraître crédible. Pourtant, l’homme apportait un soin tout particulier à cet ouvrage aux apparences de grimoire. Il se fit interrompre quand il entendit des pas arriver rapidement vers le salon. Refermant l’ouvrage d’un coup sec, il vit arriver face à lui un jeune homme d’environ 25 ans, montant peut-être vers un âge plus avancé au vu de ses marques témoignant d’un sérieux au moins aussi grand que Ball’Ek.
Il s’inclina alors face à ce dernier, avant que l’homme ne lui fasse signe de la main, terminant de boire son verre pour le poser sur le guéridon non loin. Les yeux verts coiffés d’une tignasse brune se relevèrent alors pour regarder l’homme qui revenait d’une soirée mondaine.
-Vous m’avez fait appeler sir ?
-Tu vas te rendre dans le désert du royaume, et tu vas y rester jusqu’à rencontrer une certaine Scarlett.
-Scarlett ?
-Une connaissance me fait savoir qu’elle souhaite me rencontrer pour parler de certaines choses. Mais j’ignore où elle se trouve, si ce n’est dans le désert. Cependant, tu ne devrais pas avoir de mal à la trouver. On la dit aveugle.
-Aveugle ? Et elle souhaite traverser le désert seule ?
-C’est pour ça que tu vas la mettre à l’épreuve ! Je n’ai pas de temps à perdre avec des infirmes et des bonnes femmes voulant me racontant leurs histoires rocambolesques ! Si elle ne peut pas te tenir tête, alors elle ne me sera d’aucune utilité !
-Compris sir. Je pars de suite.
Répondit l’homme qui s’éclipsa rapidement de la salle, puis du manoir, sellant un cheval pour partir en direction du désert. Mais alors qu’une entrevue future se tramait, le salon qui était toujours présent au sein de l’empire, lui, continuait de faire parler de lui. Depuis l’arrivée du comte de Potaxe, l’ambiance s’en était trouvée changée. Elle n’avait pas été pour ainsi dire dégradée. La discorde n’avait pas envahie les lieux, mais l’atmosphère qui régnait était désormais une atmosphère plus lubrique, mois retenue. Une ambiance qui ne siégeait pas à tous, notamment sir Skyfor et Lady Ecleasia. « La bleue » comme aimait l’appeler son amant ne supportait plus aussi bien cette ambiance qu’au premier jour, et s’était quelque peu éloignée du salon avec sir Skyfor, qui avait décidé de l’emmener dans sa demeure située dans les campagnes de Tanlpax.
Cette journée était ponctuée par un somptueux soleil dispersant ses rayons et sa chaleur sur tout l’empire. Dans la campagne de Tanlpax, les quelques rivières qui fuitaient entre les villages et les hameaux ruisselaient d’une eau cristalline, si bien que les pêcheurs s’en approchaient, canne et espoir en main pour pêcher dehors, par une chaleur estivale des plus agréables.
Mais alors que certains restaient à vaquer à des occupation extérieurs pour profiter de ce temps peut-être éphémère, certains, volets fermés, favorisaient un repos et une extension nocturne, simulant cette ambiance de minuit en restant plongé dans une obscurité trahie par quelques rayons de lumière transperçant les volets de bois de la demeure ou il se trouvait.
Dans une chambre fort bien rangée et entretenue, changeant avec le ton désordonné de son appartement principal, Sir Skyfor, assis sur le lit de chêne, ne contemplait ni le soin de sa ménagère apportée au rangement et à l’ordre des lieux, ni même aux doux rayons de soleil diffusant un embryon de chaleur pour réchauffer la chambre de la nuit qui fut fraîche, mais le corps dénudé de sa promise. Promise ? Non, rien n’était encore fait. Ils n’étaient nit liés, ni même engagés, mais l’homme, qui connaissait l’ardente passion de la demoiselle, se doutait que son esprit était embrumé par des pensées de cet acabit.
Dispersant les doigts de sa main gauche sur le dos découvert de lady Ecleasia, qui dormait encore, dispensant ainsi les yeux de son prochain d’une vue des plus oniriques à ses yeux, ponctuée de cette douce et légère respiration, sir Skyfor profita de cet instant seul pour contempler et caresser les formes de sa possible femme. Avec le peu de temps passés ensemble, son esprit avait finis par céder aux avances peu communes de la part de cette femme, et désormais, ce qui lui semblait encore comme une simple amourette sans issue possible, se transformait en opportunité à saisir dans un avenir proche, si l’envie lui en prenait.
Finalement, les pensées hétérogènes des deux amants se mêlèrent avec les légers gémissements de lady Ecleasia, signe de son réveil imminent. Sir Skyfor cessa alors son mouvement et recula sa main, voyant la jeune femme tourner son visage et ouvrir ses yeux en sa direction.
-Bonjour.
-Bonjour très chère. Avez-vous bien dormi ?
-Le verbe approprié serait peut-être reposer, après le début de nuit que vous m’avez offert.
-Ne dites pas cela ainsi très chère…
-Seriez-vous gêné par la réalité de vos actes ?
Répondit-elle le menton dans la paume de sa main, coude appuyé sur le matelas, un sourire espiègle en coin. Depuis le début de leur relation, l’homme avait dû apprendre à jongler entre la sucrerie de son caractère parfois rudement épicée d’une gêne s’estompant. Se plaçant dos à elle, il se gratta l’arrière de la tête, légèrement embarrassé.
-C’est votre ton qui m’embarrasse lady.
-Pourtant…
S’approchant de lui le corps dénudé, elle vint se coller dans le dos de l’homme, lui déposant un ardent baiser sur la joue, toujours animé de ce sourire.
-C’était une très belle nuit, sir Skyfor.
-… Vous m’en voyez ravi ma chère.
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